jeudi 20 novembre 2014

Le petit prince


Je sais, le petit prince, c'est un fable simple, poétique presque niaise sur la vie. Et alors, moi j'aime le petit prince, je m'y perds, je m'y retrouve...


La méfiance est née pour de nombreuses raisons, surtout la maladie, mais aussi le regard des autres sur le trouble psychiatrique, la perte de confiance en soi, les traitements, les psychotiques, les psychotropes, les sevrages, l'internement, les hôpitaux psychiatriques, les hallucinations, les doutes, les pleurs, la dépression, les angoisses, l'anxiété, l'arrêt du travail, le suicide, les idées noires, l'envie de mourir, le doute, la douleur, la difficulté, la folie, l'hygiène, les restrictions, les médicaments, la thérapie, la honte, la déception, la culpabilité,... pour ces quelques raisons, je me suis mise à douter de moi.
Quand les yeux voient des choses qui n'existent pas, quand les autres sont ceux qui voient juste, quand nos impressions sont flouées par la maladie, quand pendant un moment, il faut savoir ne plus s'écouter pour ne faire confiance qu'au traitement, une thérapie, un protocole, un médecin...

Le trouble psychiatrique c'est comme un myope, sans lunettes, il ne voit pas bien. Il enfile ces lunettes et il voit clair. Sans lunettes, il est obligé de tendre la main, il confond les choses, il pense qu'il voit mais il se trompe. Le malade psychiatrique c'est la même chose, sauf qu'il ne sait jamais s'il a ses lunettes ou pas. Je souffre de myopie mentale, je fais tout pour avoir en permanence mes lunettes avec moi mais je n'en suis pas sûre, certaine. Alors plane ce doute, en permanence, ''est ce que je vais bien ?''. J'ai appris à ne plus me faire confiance, à ne plus m'écouter, à ne plus croire ce que je croyais... Cette maladie m'a appris à me déconstruire.
A la question ''Tu vas bien ?'' , je réponds ''Comment tu me trouves ?''
Je déteste cette maladie pour toute la confiance qu'elle m'a prise, pour la honte qu'elle a posé sur moi.

Je hais cette maladie pour celle que je suis devenue, méfiante, peureuse, incertaine.

J'ai appris aussi à ne plus avoir confiance en l'autre, le regarder comme quelqu'un qui d'un coup pouvait me nuire par une phrase, un mot, une attitude me plonger dans l'abysse de la dépression, me faire pleurer, m'humilier.

J'ai vu dans l'autre celui qui quand il le voulait, quand il le décidait m'internait ''hospitalisation à la demande d'un tiers''. J'ai compris que j'étais à la merci, la merci de l'autre.

Alors j'ai appris à survoler, à ignorer, à effleurer sans m'attarder, j'ai appris à faire semblant. Plus personne n'était digne de monter dans ma tour.

Un à un, tous ceux qui comptaient, je les ai réduit à rien, il était de la poussière.

2007 je tombe malade
2014 je ''revis''

Concours de circonstance, je ne sais pas. Plein de choses ont bougé. D'un seul coup, je me sens embarquée par quelque chose de bien plus fort que moi, de bien plus grand que moi. Je me suis faite avoir, comme j'aime le dire, aujourd'hui. J'ai laissé des gens me toucher.
I
l aura fallu 7 ans pour que je redise sincèrement
 ''je crois en la qualité humaine'',
''Je pense qu'ensemble on est plus fort'',
 ''seul on va plus vite mais ensemble on va plus loin''.

Je crois au nouveau en l'intelligence collective. Je pense sincèrement que le groupe, la communauté peuvent ne pas être uniquement la somme d'individualité. J'adhère au 1+1 = 3.

Je pense que je peux devenir meilleure parce que je suis avec les autres. Je pense que j'ai ma valeur et que je peux la mettre au profit de quelque chose qui me dépasse.

J'ai retrouvé tout cela, simplement parce qu'un homme m'a apprivoisé. Ce n'était pas pour m'aimer, pour m'avoir, c'était uniquement pour être ensemble avec d'autres . De nous est né une communauté avec des valeurs, des individualités, des singularités mais surtout avec un projet collectif ''Atteindre la lune''.

Atteindre virtuellement la Lune en cumulant des km pour sa petite fille atteinte d'une maladie grave.

Alors que cela faisait des années que je survolais ma vie, j'ai été touchée en 7 mois. Cet homme m'a redonnée mon humanité, et a rendu au monde son humanité.

Je sais qu'il n'a rien fait contre moi, qu'il a juste facilité, qu'il m'a aidée, acheminée. Je  ne suis même pas certaine qu'il se doute de tout cela.

Cette aventure folle a changé ma vie.

Même si aujourd'hui, demain tout cela devait s'arrêter, je n'aurai plus peur de la vie, plus peur de moi, plus peur des autres... Je n'ai plus peur de tomber, je sais que je pourrais me relever et que l'on pourrait m'aider.

Alain, je me souviendrai de toi, de cette aventure pour toujours parce que tu as remis de la couleur dans ma vie. Tu as sauvé ma vie.

Merci.



Dans le petit prince :
Ainsi le petit prince apprivoisa le renard. Et quand l'heure du départ fut proche : - Ah! dit le renard... je pleurerai.
- C'est ta faute, dit le petit prince, je ne te souhaitais point de mal, mais tu as voulu que je t'apprivoise...
- Bien sûr, dit le renard.
- Mais tu vas pleurer! dit le petit prince.
· Bien sûr, dit le renard.
· Alors, tu n'y gagnes rien !
· J'y gagne, dit le renard, à cause de la couleur du blé.

Aucun commentaire: